Certains affirment que le CSBE recommande de favoriser le recours au privé dans le soutien à domicile, même si cela va à l’encontre du système public. D’autres vont plus loin et disent que le CSBE prône la privatisation de la santé. Qu’en est-il réellement?
Ces affirmations ne reflètent pas avec justesse les recommandations qu’a formulées le CSBE en janvier 2024, et les prises de parole de la Commissaire. Voici les faits.
Différence entre financement et offre de services
D’abord, on doit comprendre que les organisations privées dispensent déjà la majorité des services d’aide à domicile. On parle ici autant des organisations à but lucratif ou non lucratif que des organismes communautaires.
Les services d’aide à domicile comprennent le soutien pour prendre un bain, faire des tâches ménagères ou préparer les repas. Ce type de service représentait 72 % de l’ensemble des interventions réalisées à domicile en 2021-2022, peu importe le fournisseur de services.
Ainsi, ces prestataires contribuent déjà à offrir plusieurs des services d’aide à domicile dont les personnes ont besoin. Ils le font toutefois dans le cadre de services dont le financement provient du public, particulièrement de programmes administrés par les CISSS et les CIUSSS.
Préférences de la population
Que pense la population d’un recours aux organismes à but non lucratif ou au privé pour obtenir des services et des soins à domicile?
Le CSBE a fait réaliser un sondage sur les préférences pour évaluer les attentes et les besoins de la population sur cette question, notamment. Il a ensuite interpellé son Forum de consultation. Ces points de vue sont primordiaux. Ils permettent de comprendre les souhaits des usagers.
Voici des conclusions clés.
Le sondage sur les préférences
Les répondants au sondage se montrent ouverts au recours à des partenaires externes pour bonifier l’offre de services en soutien à domicile. Toutefois, ils ne souhaitent pas tous une hausse du recours au privé à but lucratif dans le domaine. En fait, c’est le recours accru à des organismes à but non lucratif qui fait presque l’unanimité pour le sous-groupe de population interrogé.
Le Forum de consultation
Selon le Forum de consultation du CSBE, des acteurs provenant d’ailleurs que du système public pourraient offrir plus de services en soutien à domicile. Les membres soulignent toutefois qu’on doit mieux encadrer l’augmentation du recours à des organismes communautaires ou à des entreprises privées. Il propose d’ailleurs plusieurs conditions et balises à cet effet.
Comme les répondants au sondage, les membres du Forum favorisent le recours à des organisations privées à but non lucratif.
Conditions de travail des professionnels
Au-delà du débat sur le recours ou non au privé en soutien à domicile se trouve un enjeu crucial : les conditions de travail des professionnels. En effet, la pénurie de main-d’œuvre touche autant le secteur public que privé. Cette situation entrave la croissance de l’offre des soins et des services à domicile.
Pour ces raisons, la commissaire souligne l’importance d’améliorer et d’uniformiser les conditions de travail du personnel qui dispense les services, tous secteurs confondus.
Mise sur pied du copaiement
Le CSBE propose bien d’instaurer un copaiement pour certains services d’aide à domicile, comme le soutien pour faire le ménage. Le copaiement est une contribution financière demandée à la personne qui utilise ces services, ajustée en fonction de ses moyens. Cette contribution touche les services financés par le gouvernement seulement.
Le CSBE ne souhaite pas que le copaiement s’applique aux soins de santé offerts à domicile, comme les services médicaux, infirmiers ou palliatifs. Ces soins doivent demeurer gratuits.
Le copaiement fait partie des stratégies qu’on peut instaurer pour rendre plus viables financièrement les services de soins de longue durée. Ces soins comprennent le soutien à domicile. Plusieurs autres pays et des provinces canadiennes, comme la Colombie-Britannique, ont choisi cette approche.
Selon la commissaire, il ne s’agit pas d’une façon pour l’État de se désengager. En fait, le vieillissement de la population est un défi de taille et le demeurera. La viabilité financière à long terme des services de longue durée est donc en jeu. En effet, les recherches du CSBE prévoient un déséquilibre croissant entre l’offre et les besoins des personnes dans ce domaine, ce qui nuira à la pérennité des services.
Des soins et services qui répondent aux besoins
En résumé, la commissaire ne recommande pas d’augmenter le recours au privé en soutien à domicile au détriment du système public gratuit et universel. Son but est plutôt de mettre de l’avant tous les moyens d’accroître l’offre de soins et de services pour qu’ils répondent mieux aux besoins de la population.
Pour y parvenir, nous croyons que le système public devrait permettre à tous d’avoir accès aux services de soutien à domicile avec facilité. De plus, les personnes qui en ont les moyens devraient contribuer au financement de l’aide à domicile. On ne doit pas non plus négliger les conditions de travail des professionnels, que l’on doit améliorer.
Par ailleurs, la question de la viabilité du système de santé et de services sociaux est plus pressante que jamais. Nous devons nous attarder maintenant à cet enjeu majeur en mettant sur pied un copaiement ou l’un des autres moyens existants. Pour relever ce défi, nous devons aussi tenir un débat public éclairé qui se base sur des données fiables et objectives.
Pour obtenir l’heure juste sur les recommandations de la commissaire en soutien à domicile, consultez notre quatrième rapport Bien vieillir chez soi.